Délit de mise en danger par diffusion d’information | Loi du 24 août 2021

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En réaction au drame ayant frappé le professeur Samuel Paty, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a créé une nouvelle infraction. L’article 223-1-1 du Code pénal sanctionne ainsi la mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’une information. Ce nouveau délit vise une pratique d’origine anglo-saxonne, appelée « doxing », de la contraction de « dropping dox ». Littéralement, elle consiste en un lâcher d’informations. L’auteur délivre ainsi les informations à caractère personnel d’un individu, sans son consentement, dans l’objectif de lui nuire. Il le livre ainsi en pâture aux internautes, ce qui représente un risque considérable pour l’intéressé, sa famille ou ses biens. L’affaire Paty a malheureusement mis en lumière le risque dramatique de cette pratique lorsqu’elle fait écho sur les réseaux sociaux et se réalisent dans le réel. Zoom sur les éléments constitutifs du délit de mise en danger par diffusion et sa mise en pratique.

Mise en danger par diffusion d’information

Le nouvel article 223-1-1 du Code pénal condamne le fait de révéler, diffuser ou transmettre les informations relatives à une personne permettant de l’identifier ou de la localiser, sans pouvoir ignorer l’exposer à un risque direct d’atteinte à l’intégrité physique ou aux biens. Le délit peut être constitué sans même qu’il y ait de réels dommages, car c’est la diffusion d’information qui est sanctionnée dans la mesure où elle expose une personne à un risque.

Diffusion de l’information

La constitution de l’infraction repose sur la diffusion d’une information relative à la vie privée, familiale ou professionnelle permettant d’identifier ou de localiser une personne physique. Le texte vise principalement la diffusion de l’information sur les réseaux sociaux, mais il admet également tout autre moyen de transmission.

Il peut donc s’agir de photos ou vidéos, d’informations relatives aux nom, prénom, coordonnées numériques ou données postales d’une personne. Cela peut également concerner les informations relatives à son travail ou aux autres lieux régulièrement fréquentés, et plus généralement, toutes celles se rapportant à ses habitudes de vie. Par analogie, les informations visées pourraient être toutes les données personnelles visées par le RGPD.

Risque direct d’atteinte à la personne

La diffusion de l’information doit constituer un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens. Sans cela, le délit n’est pas constitué. Or, il faut apprécier la notion de risque direct, par opposition au risque simple et au risque immédiat. Le risque s’entend de la probabilité de survenance d’un événement défavorable. Le législateur parle ici de risque direct et non pas de risque immédiat, afin de ne pas soumettre l’appréciation du risque à un critère de temporalité. Le risque est caractérisé parce qu’il est tangible, sans avoir à prendre en considération le moment où il survient.

Exposition à un risque connu

L’auteur doit exposer autrui à un risque qu’il ne peut ignorer. La connaissance du risque est appréciée en fonction des éléments de fait qui entourent la diffusion. On se base ainsi sur le ton d’une discussion, un sujet polémique, le libre accès par le public à un message. C’est donc l’appréciation du contexte qui doit laisser craindre une utilisation malveillante de l’information.

Intention de nuire

On déduit des mêmes éléments de fait l’intention de nuire de l’auteur lorsqu’il diffuse l’information. En pratique, cela suppose de prouver que l’individu a agi consciemment dans le but de mettre en danger autrui pour pouvoir caractériser l’infraction. La démonstration de cette intention particulière de nuire risque de ne pas être aisée. Le délit de mise en danger par diffusion d’information constitue néanmoins un obstacle bienvenu pour lutter contre les abus et les débordements croissants liés aux réseaux sociaux.

Répression de l’infraction

Le délit de mise en danger par diffusion d’information est puni de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.

Les peines sont portées à 5 ans de détention et 75 000 € d’amende lorsque l’infraction est commise à l’encontre :
– D’une personne dépositaire de l’autorité publique ;
– D’un journaliste ;
– D’un mineur ou d’une personne particulièrement vulnérable en raison de son âge ou son état de santé.

Photo : Sergey Zolkin on Unsplash