L’abus de faiblesse | Mettre en œuvre l’infraction du Code pénal

l'abus de faiblesse

L’infraction d’abus de faiblesse est prévue par l’article 223-15-2 du Code pénal. Elle punit le fait de profiter de l’état d’ignorance et de faiblesse d’un mineur ou d’un majeur particulièrement vulnérable. L’auteur conduit ainsi la victime à agir de façon préjudiciable pour elle-même. Les personnes âgées sont souvent les premières victimes, mais pas seulement. Quelles sont les personnes recevables au dépôt de la plainte ? Et comment caractériser le délit d’abus de faiblesse pour en obtenir une sanction ? La réponse en 3 points.

Personnes recevables au dépôt de plainte

Au travail, en famille ou dans le cadre d’une relation commerciale, les hypothèses d’un abus de faiblesse sont nombreuses. Mais on vise particulièrement les visites à domicile ou le démarchage téléphonique, au cours desquels un professionnel peut contraindre une personne âgée ou vulnérable à acheter un bien ou un service sans intérêt pour lui. De même, pour toute transaction signée dans l’urgence lorsque la victime signe sans pouvoir avoir l’avis d’un tiers. La dépendance et la solitude sont souvent les points d’accroches pour l’auteur.

Qu’il s’agisse d’un don extorqué sous la contrainte, d‘une vente forcée ou d’une procuration bancaire obtenue sans raison valable, la victime d’un abus de faiblesse peut déposer une plainte pénale auprès du commissariat de police, de la gendarmerie nationale ou du Procureur de la République.

De même, les proches ou héritiers de la victime ont également intérêt à agir en justice pour dénoncer lorsqu’ils subissent un préjudice direct causé par l’infraction. Il peut par exemple s’agir d’un héritage dilapidé du fait de détournements de liquidités ou comptes bancaires ou encore de donations déguisées.

Le délit d’abus de faiblesse ouvre droit à une action dans un délai de 6 ans à compter de la commission de l’infraction. Néanmoins, les juges ont retenu qu’en matière d’abus frauduleux procédant d’un mode opératoire unique, la prescription ne commence à courir qu’à partir du dernier prélèvement sur le patrimoine de la victime.

Éléments constitutifs du délit d’abus de faiblesse

Le texte vise 3 situations de vulnérabilité de la victime, constituant l’élément matériel de l’infraction. Ainsi, l’abus de faiblesse est caractérisé lorsque :

– la victime est mineure ;
– la victime présente un état de vulnérabilité (âgée, maladie, infirmité, déficience physique ou psychique, état de grossesse) ;
– la victime est dans un état de dépendance psychologique ou physique en raison de pressions graves exercées afin d’altérer son jugement (notamment pour lutter contre les mouvements sectaires).

Toutefois, la situation de faiblesse de la victime ne se présume pas du seul fait de l’âge avancé ou de son état de santé. Il revient à la victime d’établir la preuve de sa vulnérabilité au moyen de certificats médicaux (médecin-traitant, psychologue, psychiatre, etc.), d’attestations de témoins (proches, amis, voisins, etc.) ou d’un jugement du Juge des tutelles s’il y a lieu lorsque la victime fait l’objet d’une mesure de protection (curatelle ou tutelle). De même, cet état d’ignorance ou de faiblesse de la victime doit réellement altérer son jugement.

Par ailleurs, le délit d’abus de faiblesse n’est caractérisé que si l’action frauduleuse conduit la victime à accomplir un acte ou à une abstention qui provoque un préjudice grave pour elle-même.

Enfin, les juges doivent caractériser expressément l’élément intentionnel de l’infraction. Cela suppose que les actes de l’auteur sont guidés par la volonté d’abuser de l’état connu de faiblesse de sa victime. Les éléments de preuve doivent donc démontrer que l’auteur a mis en place des pressions graves afin d’altérer le jugement de la personne en état de vulnérabilité. Lorsque les faits ne réunissent pas les conditions de l’abus de faiblesse, il est possible d’agir sur le fondement d’autres infractions comme le délit de pratique commerciale trompeuse.

Sanction de l’abus de faiblesse

Les personnes coupables d’abus de faiblesse encourent jusqu’à 3 ans de prison et de 375 000 € d’amende. Les complices d’un abus de faiblesse encourent d’ailleurs la même sanction. La peine est portée à 5 ans d’emprisonnement et 750 000 € d’amende pour les infractions commises par le dirigeant d’un mouvement sectaire (dont le but est de créer et d’exploiter une dépendance vis-à-vis de ses membres).

La peine peut être assortie de sanctions complémentaires comme :

– L’interdiction des droits civils et civiques ;
– L’interdiction d’exercer une fonction (publique ou professionnelle) à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise ;
– La confiscation de l’objet de l’infraction (chose détournée ou financée par les fonds extorqués).

Photo : Andrea Piacquadio provenant de Pexels