En France, le changement de nom demande une procédure à la fois longue, coûteuse et fastidieuse, sans aucune garantie d’une réponse favorable. Aujourd’hui, une proposition de loi change la donne, en simplifiant les démarches à suivre.
Une proposition de loi LREM
Un texte de loi porté par le député Patrick Vignal
La simplification de la procédure de changement de nom en France est initiée par le député de la 9e circonscription de l’Hérault (LREM) Patrick Vignal. La proposition de loi « relative au choix du nom issu de la filiation » a obtenu le soutien du ministre de la Justice, Éric Dupont-Moretti. Le dispositif est rapidement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 26 janvier 2021, avec 49 voix favorables, 5 oppositions et 2 abstentions. Le projet de loi s’est ensuite heurté aux objections de la droite sénatoriale en commission le mardi 15 février. Le Sénat s’est opposé à la mesure phare portant sur le changement de nom de famille qui figure obligatoirement sur les actes d’état civil. Si les sénateurs et les députés ne trouvent pas de compromis en commission mixte paritaire, le dernier mot reviendra à l’Assemblée nationale le 24 février prochain. En principe, le projet de loi entrera en vigueur en juillet 2022.
L’influence du collectif « Porte mon nom »
D’après les propos recueillis auprès du porteur de la proposition, le texte de loi a été inspiré par le collectif « Porte mon nom ». Depuis déjà deux ans, ce mouvement créé par Marine Gatineau Dupré milite pour l’automatisation du double nom de famille à la naissance. Le but est de simplifier les démarches pour les personnes qui souhaitent porter le nom du parent qui n’a pas été attribué à la naissance. Le principe s’applique aussi bien au nom d’usage utilisé dans la vie quotidienne qu’au nom de famille qui s’inscrit sur l’acte d’état civil.
Le changement de nom, une procédure complexe
Une demande en plusieurs étapes
En France, le changement de nom relève d’un véritable parcours du combattant. D’après l’article 61 du Code civil, il est avant tout obligatoire de justifier le changement de nom d’un motif légitime. Il peut s’agit entre autres d’un nom difficile à porter et jugé péjoratif, voire ridicule. La demande se fait donc en plusieurs étapes :
– déposer une demande de publication d’annonce préalable au changement de nom au Journal officiel,
– publier la demande dans un journal d’annonces légales (JAL) habilité dans le département de résidence,
– déposer une demande officielle de changement de nom au ministère de la Justice.
À cette étape de la procédure, le demandeur constituera un dossier dont les pièces justificatives dépendent de sa demande. Les documents qui reviennent souvent dans toutes les démarches sont :
– la pièce d’identité,
– une copie de l’acte de naissance,
– les justificatifs de parution des annonces au Journal officiel et dans un journal d’annonces légales.
Le ministère de la Justice procède ensuite à une instruction, avec une consultation du Conseil d’État en cas de besoin.
Le délai d’obtention de la décision est variable. Si certains cas sont résolus après seulement quelques mois, d’autres s’étendent tout de même sur plusieurs années, sans aucune garantie d’une réponse favorable. Le député Patrick Vignal a tenu de préciser qu’en 2020, l’administration française a reçu 4 293 demandes de changement de nom. Malgré l’engouement des citoyens français, seulement 44 % des requêtes ont été jugées recevables.
Un simple formulaire Cerfa
Face à la complexité de la procédure, la proposition de loi du député LREM vient simplifier les démarches à suivre pour changer de nom en France. Si le projet de loi entre en vigueur, alors la démarche sera avant tout gratuite. Aucun motif légitime ne sera exigé pour déclencher la procédure, et la publication légale ne sera plus obligatoire. Avec la nouvelle procédure, il suffit de remplir un formulaire Cerfa à transmettre au service d’état civil de la mairie du demandeur.
Des règles moins lourdes pour le nom d’usage
Changer de nom de famille une fois dans sa vie
Grâce à cette proposition de loi, chacun est autorisé à changer de nom de famille une fois dans sa vie. Le dispositif s’adresse à toute personne majeure âgée de plus de 18 ans qui souhaite porter le nom de famille du parent qui ne lui a pas été attribué à la naissance. D’après l’initiateur de la proposition de loi, 85 % des enfants reçoivent le nom de leur père à la naissance. Le choix est généralement justifié par la tradition selon laquelle la mère donne la vie, et en contrepartie, le père donne son nom. En cas de séparation, ce choix risque de compliquer la vie de tous jours. En général, les mères qui élèvent seules leurs enfants sont obligées de justifier la parentalité à l’aide d’un livret de famille.
De nouvelles règles plus simples
La proposition de loi du député LREM assouplit les règles sur le changement de nom d’usage. Il sera désormais possible de remplacer le nom du parent mis en place à la naissance par celui de l’autre parent. Bien entendu, le demandeur est toujours autorisé à accoler le nom des deux parents dans l’ordre qui lui convient. En revanche, pour le cas d’un enfant mineur, l’accord des deux parents sera nécessaire. À défaut, il faudra saisir le juge aux affaires familiales. Si l’autorité parentale est exercée de manière unilatérale, alors le changement de nom de l’enfant revient au titulaire de cette autorité parentale. Aucune formalité particulière ne sera requise. Si l’enfant est âgé de plus de 13 ans, alors son consentement au changement de nom d’usage est indispensable.
Image : Wesley Tingey on Unsplash