La loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique revient sur la question de la filiation de l’enfant issu d’une assistance médicale à la procréation. Les règles concernant la filiation de l’enfant issu d’une AMP avec tiers donneur sont reprises sans grands changements. Mais la loi introduit dans le Code civil un nouveau chapitre, comportant des dispositions concernant la filiation de l’enfant issu d’une AMP sollicitée par un couple de femmes. Elle crée ainsi un nouveau mode d’établissement de la filiation par reconnaissance conjointe. Ce faisant, elle tend à assurer une stabilité à une filiation établie avec le concours de la biologie, puisque par hypothèse l’enfant n’est pas biologiquement celui du couple.
Lien de filiation à l’égard du couple demandeur
En application du droit commun, la filiation maternelle résulte de la désignation de la mère dans l’acte de naissance de l’enfant. La filiation paternelle à l’égard du mari résulte quant à elle de la présomption de paternité s’il s’agit d’un couple marié. Dans le cas d’un couple non marié, l’établissement de la filiation paternelle nécessite une reconnaissance de la part du concubin ou du partenaire.
Le consentement donné à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur tend à interdire toute action en contestation de la filiation à l’égard du couple demandeur. Même si l’enfant n’est pas l’enfant biologique du couple, le consentement rend sa filiation incontestable. Encore faut-il que le processus de l’AMP soit pleinement respecté.
Ainsi, lorsque le consentement est privé d’effet, une action en contestation devient possible. Cela vise principalement le cas d’une rétractation de la part de l’un des membres du couple intervenue par écrit avant la réalisation de l’AMP, ou encore d’un décès dans le couple ou d’un divorce.
Filiation à l’égard d’un couple de femmes
En ouvrant la procréation assistée aux couples de femmes, le législateur pose une situation qui rompt totalement avec la réalité biologique. La loi du 2 août 2021 instaure un système de filiation hybride et spécifique, ayant vocation à s’appliquer aux assistances médicales à la procréation réalisées après le 4 août 2021.
La filiation de la femme qui accouche est établie classiquement par la simple indication de son nom dans l’acte de naissance. Mais le législateur impose une reconnaissance conjointe de l’enfant devant le notaire, en même temps que le couple exprime son consentement à l’AMP. Une fois la publicité effectuée auprès de l’officier de l’état civil, la filiation se trouve à l’abri de toute action en contestation et aucune autre filiation ne peut être établie.
Le texte prévoit en outre un dispositif transitoire pour répondre à la situation fréquente de couples de femmes qui se sont rendues à l’étranger avant la publication de la loi pour bénéficier d’une AMP qu’elles ne pouvaient obtenir en France. Ainsi, pendant 3 ans à compter de la publication de la loi, le législateur ouvre ainsi une reconnaissance conjointe devant notaire, sur instruction du procureur de la République, afin d’établir un lien de filiation à l’égard de la femme qui n’a pas accouché.
Interdiction d’établissement d’un lien de filiation à l’égard du donneur
Aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don de sperme, ovocyte ou embryon et l’enfant issu de l’AMP. En cela, l’article 342-9 du Code civil reprend les termes de l’ancien article 311-19 du même code. De même, le texte exclut toute action en responsabilité à l’encontre du donneur.
La loi bioéthique du 2 août 2021 a néanmoins ouvert à l’enfant issu d’une assistance médicale à la procréation le droit de connaître les données et l’identité de son parent biologique. Cela représente un risque de confusion évident dans l’esprit des donneurs potentiels, comme des parents. Il est donc indispensable de faire preuve de pédagogie pour expliquer que l’acceptation de communiquer leur identité ne permet en aucune manière une action sur le plan de la filiation.
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