Une personne ne doit pas être condamnée sans avoir été en mesure de se défendre. Les droits de la défense sont consacrés en droit interne et en droit international, par la Convention européenne des droits de l’Homme et l’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Mais ceux-ci ne peuvent être effectifs que si les parties sont correctement informées de leurs droits, notamment de celui de se taire.
Le droit à l’information, garant de l’effectivité des droits de la défense
Le droit à l’information découle directement des principes directeurs du procès. Chacun a droit à un procès équitable. En premier lieu, la personne doit recevoir l’information quant à l’existence du procès qui lui est fait et de son droit à se défendre. La partie peut alors choisir d’assurer sa défense elle-même, en dehors des cas où la représentation est obligatoire, comme devant le tribunal de grande instance. Elle peut aussi choisir de se faire représenter ou se faire assister par l’avocat de son choix.
Lorsque l’instance est introduite, les parties reçoivent l’information du droit d’être jugé par un tribunal impartial. Elles sont par ailleurs informées des voies et délais de recours, ainsi que des conditions pour les exercer. Le jugement suppose une décision motivée. Cela permet à la fois de contrôler l’impartialité du juge et d’évaluer la pertinence d’un recours.
Le droit au silence, garant de la défense pénale
L’article 63-1 du Code de procédure pénale introduit le droit pour une partie de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou bien de se taire. Le législateur prévoit ainsi un droit au silence. Il permet de ne pas répondre dans l’urgence, de bien analyser ce qui doit être dit et comment, dans le but d’une défense efficace. C’est également un temps qui laisse la possibilité à l’accusé d’obtenir une copie du dossier lorsqu’il est convoqué devant le juge d’instruction ou le Tribunal correctionnel. Il peut alors se défendre en connaissance des charges qui pèsent sur lui.
Le droit de garder le silence, ou droit de se taire, est protégé par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques signé en 1966. Il s’agit de protéger l’accusé de pratiques abusives des autorités et d’éviter les erreurs judiciaires. En France, la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, transposant la directive européenne n° 2012/13/UE, est venue généraliser la portée du droit de garder le silence à l’ensemble de la procédure pénale.
Le droit de se taire est donc mis en œuvre à tous les stades de la procédure :
- Pour le suspect en garde à vue ou entendu librement ;
- Durant la mise en examen par la juridiction de l’instruction ;
- Devant les juridictions de jugement, que ce soit pour une contravention, un délit ou un crime.
L’information du droit de se taire, une étendue ambiguë
La loi dispose que l’accusé doit être informé de son droit de garder le silence dès sa mise en cause et jusqu’au terme de la procédure. Pourtant, la situation posée par l’article 116 du Code de procédure pénale est ambiguë. Le droit de se taire peut certes être opposé tout au long de la procédure, mais aucune disposition n’impose qu’il en soit fait information à chaque acte de celle-ci. Le contentieux à propos de l’omission d’informer l’intéressé de son droit de se taire est donc important.
Le rappel du droit de se taire au cours de la procédure
En novembre 2020, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu un arrêt concernant cette question dans une affaire d’homicide involontaire. Les juges s’interrogent alors sur le point de savoir si le droit de se taire doit être rappelé au cours de la procédure, lorsqu’il a été signifié au début de celle-ci. En l’espèce, l’intéressé a préalablement été placé sous le statut de témoin assisté. Ses droits lui ont donc été notifiés à ce stade de la procédure. Or, celui-ci demande la nullité de l’acte au motif qu’il n’a pas reçu l’information de pouvoir garder le silence lors de sa mise en examen postérieure.
Les juges du fond rappellent que le droit de se taire est un des piliers du droit à un procès équitable. Il doit donc pouvoir être exercé tout au long de la procédure. Pour autant, une seule notification est valable pour l’ensemble de celle-ci. En effet, la multitude et la complexité des actes successifs pouvant intervenir au cours de l’instruction justifient que les formalités ne s’imposent que lors de la première comparution devant le juge d’instruction. Il n’est donc pas nécessaire de réitérer lorsque l’intéressé a déjà été mis en mesure d’exercer son droit de se taire. Aussi, seule l’entrave au bénéfice de ce droit permet de justifier la nullité de l’acte de procédure.
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