Dans le cadre de son mandat social, le dirigeant d’entreprise accomplit les actes de gestion, d’administration ou de direction de la société qui lui sont confiés. La mise à jour des informations liées aux organes sociaux auprès des autorités administratives compétentes lui permet aussi de représenter légalement la société vis-à-vis des tiers. En revanche, le retard voire l’absence de formalités de publicité consécutives à un changement de dirigeant peut entraîner de lourdes conséquences sur sa responsabilité pénale et civile.
Les formalités liées au changement de dirigeant : une obligation légale
Les dirigeants de sociétés sont soit nommés dans les statuts soit désignés par les associés ou les actionnaires. C’est le cas notamment pour le gérant d’une SARL ou le président d’une SAS. La loi ou les statuts peut également prévoir des conditions différentes dans certains cas. Leur nomination prend effet pour un temps limité ou une durée indéterminée. L’entrée en fonction d’un nouveau dirigeant fait suite à tout événement entraînant la cessation des fonctions de son prédécesseur. Cela peut être causé, par exemple, par :
- l’arrivée à son terme d’un mandat social ;
- une démission ;
- une révocation judiciaire ;
- décision d’associés ;
- un décès,
- une interdiction de gérer, etc.
En principe, la décision qui fait état de la désignation d’un nouveau dirigeant prend aussi acte de la cessation des fonctions du dirigeant précédent. Tout changement intervenant dans la direction de la société doit alors s’accompagner de formalités. Elles sont d’abord à réaliser auprès d’un journal d’annonces légales (JAL). Le greffe du tribunal de commerce doit également en être informé. Il convient de réaliser ces formalités dans un délai d’un mois suivant la décision. Le dépôt de ce dossier de demande d’inscription modificative au Registre du commerce et des sociétés (RCS) aboutit à l’enregistrement de la formalité. Il rend alors effective la nomination du dirigeant ou la cessation de ses fonctions. Les informations relatives aux organes de direction sont alors régulièrement mises à jour sur l’extrait Kbis de la société. Elles deviennent ainsi opposables aux tiers.
La prise d’effet du changement de dirigeant : le point de vue jurisprudentiel
La société ne peut prétexter l’existence d’une décision de nomination ou de cessation des fonctions d’un dirigeant auprès des tiers tant que la publication de cette décision au Registre du commerce et des sociétés (RCS) n’a pas eu lieu. C’est le Code de commerce qui fixe cette règle. La prise d’une telle décision ne peut suffire à rendre la désignation ou le départ d’un dirigeant effectif. C’est le cas même si cette décision est actée dans les statuts de la société ou dans un procès-verbal.
Pourtant, à cet égard, la jurisprudence fait preuve de plus de souplesse que le Code de commerce. En effet, la jurisprudence considère que la nomination d’un dirigeant est effective même en l’absence d’une publicité régulière de sa nomination. Un dirigeant qui aurait accepté la gestion, la direction ou l’administration de la société et aurait commencé à en exercer les prérogatives demeure habilité à représenter la société envers les tiers. Il doit en conséquence assumer les responsabilités attachées à ses fonctions dès sa nomination.
En revanche, s’agissant de la cessation de ses fonctions il en va différemment. Les juges estiment que la responsabilité personnelle du dirigeant de société reste engagée vis-à-vis des tiers jusqu’à la publication de l’inscription modificative au RCS. Celle-ci tient compte de la fin de son mandat social. Un retard dans la publication de cette formalité ne peut de fait affranchir le dirigeant sortant de ses responsabilités.
Le défaut de publication : mise en cause de la responsabilité civile et pénale du dirigeant
Le défaut de publication au RCS engage assurément la responsabilité civile et pénale de l’ancien dirigeant. Or l’accomplissement de ces formalités incombe au nouveau gérant ou nouveau président de la société. C’est pourquoi, en cas d’inaction de la société une solution a été trouvé. Le dirigeant démissionnaire a la possibilité de procéder lui-même à la régularisation de sa situation juridique. Afin d’obtenir le retrait de son nom de l’extrait Kbis de la société, l’ancien dirigeant peut ainsi constituer un dossier de démission pour ordre. Il devra le déposer devant le tribunal de commerce du lieu du siège social. Il peut également requérir du président du tribunal de commerce la désignation d’un mandataire. Ce dernier pourra accomplir les obligations légales de publicité négligées par la société. Enfin, lorsque le différend persiste, le dirigeant sortant conserve la possibilité de recourir à certaines actions en justice.
Mais attention, la cessation des fonctions du dirigeant, même publiée au greffe du tribunal de commerce, n’est parfois qu’apparente. C’est le cas lorsque le dirigeant sortant, désormais dépourvu de mandat social participe toujours à la gestion, la direction ou l’administration de la société. Il devient alors dirigeant de fait et s’expose en conséquence aux mêmes condamnations pénales en cas d’infractions commises au droit des sociétés que le dirigeant de droit. La mise en cause de sa responsabilité civile est, quant à elle, soumise au droit commun couvert par le Code civil.