Par une décision du 1er juillet 2020, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur les montants des frais d’inscription aux établissements supérieurs applicables aux étudiants étrangers pour l’année universitaire 2019/2020.
Malgré une hausse significative, et ce, pour une certaine catégorie d’étudiants seulement, le Conseil d’Etat a estimé que les principes d’égal accès à l’enseignement supérieur et d’égalité des usagers devant le service public n’ont pas été méconnus.
Les faits d’espèce
En l’espèce, un arrêté ministériel a été pris le 19 avril 2019 fixant le montant des droits d’inscription à l’enseignement supérieur pour l’année universitaire 2019-2020.
Deux catégories d’étudiants sont définies par l’arrêté.
Les étudiants ressortissants de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou encore de la Confédération suisse, les réfugiés, les étudiants domiciliés fiscalement en France rattachés à un foyer fiscal en France depuis au moins deux ans, les étudiants bénéficiant de frais d’inscription identiques aux ressortissants français ou d’une dispense de l’obligation de détenir un titre de séjour en France, les étudiants en prépa publique, les doctorants et les étudiants en médecine, en odontologie et en pharmacie, doivent acquitter de droits d’inscription à hauteur de quelques centaines d’euros en moyenne (170 € pour une licence, 243 € pour un master, 380 € pour un doctorat).
A contrario, les étudiants qui ne relèvent pas de ces catégories, dits les « étudiants en mobilité internationale », doivent acquitter des droits d’inscription qui s’élèvent à plusieurs milliers d’euros (2 770 € pour une licence, 3 770 € pour un master).
La procédure
Des syndicats étudiants ont notamment demandé au Conseil d’Etat l’annulation de cet arrêté interministériel.
Les requérants soutenaient que les montants des droits d’inscription pour « les étudiants en mobilité internationale » méconnaissent les principes d’égal accès à l’enseignement supérieur et de gratuité en ce qu’elles sont loin d’être modiques.
Aussi, ils considéraient que la distinction faite entre les catégories d’étudiants, qui serait fondée sur leur origine géographique, sur la base de laquelle repose la fixation des droits d’inscription, méconnaîtrait le principe d’égalité entre les usagers du service public.
La problématique
La hausse des frais d’inscription pour certains étudiants étrangers méconnaît-elle les principes constitutionnels d’égalité ?
La solution du Conseil d’Etat
Sur l’arrêté attaqué
Si le treizième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 pose les principes d’égal accès à l’enseignement supérieur et de gratuité, le Conseil d’Etat rappelle que ces exigences à valeur constitutionnelle ne font pas obstacle à ce que soient imposés aux étudiants des frais d’inscription modiques au regard de leurs capacités financières (décision QPC du 11 octobre 2019).
Pour apprécier le caractère modique ou non des droits d’inscriptions, le Conseil d’Etat s’est alors penché sur la part des droits d’inscription dans le coût annuel moyen de la formation, selon les chiffres de la Cour des comptes, et rapportés dans les pièces du dossier ; de plus, les juges rappellent que non seulement des aides sont accordées aux étudiants conformément à l’article L. 111-1 du code de l’éducation, et qu’ils peuvent tirer profit du dispositif d’exonération de ces frais mis en place par le décret du 19 avril 2019 (attaqué dans cette décision). Par conséquent, les moyens des requérants sont infondés.
De plus, le Conseil d’Etat rappelle que le principe d’égalité ne s’oppose pas que des situations différentes soient traitées de manière différente à condition que cette différence de traitement soit en lien direct avec l’objet de la règle qui la met en place, et qu’elle ne soit pas disproportionnée.
Pour le Conseil d’Etat, la différence de traitement est justifiée par la différence de situations qui existe entre les étudiants qui viennent en France pour s’établir de manière durable sur le territoire, et ceux qui y viennent uniquement pour se former. A cet égard, il souligne que l’un des objectifs du service public de l’enseignement supérieur est de former des individus qui sont invités à participer à la vie économique, sociale, scientifique et culturelle du pays et à son développement. Dès lors, eu égard à cet objectif, la différence de traitement est en rapport avec cette différence de situations et n’est pas disproportionnée. Par conséquent, les moyens des requérants sont infondés.