Bâtiment, industrie, agriculture… Dans ces secteurs professionnels, il est fréquent de faire appel aux travailleurs détachés. Déjà très encadrées, les conditions d’accueil d’un salarié se durcissent un peu plus depuis le 30 juillet 2020 et l’application de la directive européenne de mars 2018. Alors comment recourir au travail détaché ?
Travail détaché, définition
Le détachement se présente comme l’envoi d’un salarié d’un pays de l’Union Européenne (U.E) vers un autre État membre afin d’y fournir temporairement un service.
Si la rémunération est celle pratiquée dans le pays d’accueil, les cotisations sociales dues sont celles du pays d’origine. Et c’est le droit du travail du pays d’accueil et la convention collective correspondant à l’activité exercée qui s’appliquent.
En 2018, 1,9 millions de salariés de l’U.E. étaient concernés. La France comptait en 2017 516 000 Européens détachés sur son sol tandis que 75 800 Français exerçaient en Europe.
Une pratique encadrée
Le détachement ne peut être réalisé que si l’entreprise, le salarié et la mission répondent aux critères fixés par la loi.
L’entreprise doit être régulièrement établie dans le pays d’origine du salarié et avoir une occupation autre que la gestion administrative. Sa collaboration avec la France doit être ponctuelle et temporaire.
Les salariés doivent travailler habituellement avec la société et ne pas avoir été recrutés uniquement pour la mission de détachement.
La mission de détachement doit avoir pour objet :
- un contrat de prestation de service international ;
- une mobilité intra-entreprise ou intragroupe ;
- un contrat de mise à disposition de salariés entre une entreprise de travail temporaire étrangère (ETT) et l’entreprise en France ;
- une opération pour compte propre.
Les formalités qui restent obligatoires
Les démarches administratives pour accueillir un salarié détaché ne changent pas.
Depuis le pays d’origine et avant le début de la mission, l’employeur transmet une déclaration préalable de détachement à l’inspection du travail du lieu d’accueil. Cette démarche se fait par voie dématérialisée. Les opérations pour compte propre et certaines missions de courtes durées sont exonérées de cette déclaration.
La déclaration de détachement désigne un référent au sein de la société d’accueil. Il est chargé de remplir les obligations qui incombent à l’entreprise. C’est par exemple lui qui fait le lien avec les inspecteurs du travail.
L’employeur doit conserver pour l’inspection du travail les documents relatifs au salarié et à l’entreprise.
Des règles spécifiques selon les domaines d’activités
Selon les branches, des obligations spécifiques s’appliquent. Les transports routiers sont soumis à une législation à part.
Les ouvriers du bâtiment et des travaux publics (BTP) détiennent obligatoirement une carte d’identification professionnelle.
Les entreprises du BTP et du spectacle doivent cotiser à une caisse de congés payés et une caisse « intempéries » pour le BTP.
Les ETT doivent respecter le cadre du travail temporaire en France.
Les nouveautés de la circulaire
L’ordonnance du 20 février 2019, qui est entrée en application à l’été 2020, vise à renforcer la protection des salariés et à diminuer le recours au détachement.
À travail égal salaire égal
Jusqu’à présent, les collaborateurs détachés étaient payés au salaire minimum en vigueur dans le pays d’accueil. Avec la nouvelle législation, ils devront percevoir la même rémunération qu’un employé local effectuant les mêmes tâches.
Les primes (travail de nuit, pénibilité) prévues par les accords collectifs leur sont désormais dues, tout comme les indemnités de repas, d’hébergement et de transport.
Le détachement de longue durée
Auparavant, le détachement pouvait durer deux ans. L’ordonnance de 2019 crée un statut de détachement de longue durée d’un an, prolongeable six mois. La prolongation est soumise à déclaration préalable. Elle doit être motivée (retard sur un chantier en raison des intempéries, crise sanitaire…).
Au-delà de ces dix-huit mois, le salarié profitera de l’ensemble des droits des employés du pays d’accueil, à l’exception des dispositions sur la conclusion et la rupture du contrat de travail.
Un renforcement des sanctions
Les employeurs sont toujours passibles des peines prévues par le Code du travail en cas d’infraction.
Ils risquent également une amende de quatre mille euros par salarié détaché en cas de manquement à la déclaration préalable et à la désignation d’un référent. L’amende est portée à huit mille euros en cas de récidive.
Dorénavant, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation du travail et de l’emploi (Direccte) ont la possibilité d’interdire une nouvelle prestation de travail détaché à une entreprise en défaut de paiement de ses amendes, avant même qu’elle n’en fasse la demande.
De nouvelles mesures devraient être prises dans les mois à venir. La ministre du Travail a déjà annoncé un nouveau plan de « résorption par secteur » du travail détaché d’ici décembre.