Par un arrêt du 28 mai 2020, la Cour de cassation souligne que, lorsqu’un organisme HLM acquiert des appartements régis par le droit commun des baux d’habitation, le régime de droit commun demeure applicable au contraire du régime propre aux HLM. En revanche, selon le principe en vertu duquel de nouveaux contrats naissent après une reconduction, la reconduction d’un bail de droit commun fait naître un nouveau bail, entre le locataire et l’organisme HLM, désormais régi par le régime propre aux HLM.
Les faits d’espèce
Le 15 juillet 1981, les requérants deviennent locataires d’un appartement régi par un bail de droit commun. Le 2 juillet 2001, l’appartement est cédé à une société HLM qui l’acquiert au moyen d’un prêt locatif intermédiaire (PLI). Après le décès de l’un des locataires, la société HLM soumet la requérante à plusieurs offres de relogement que celle-ci refuse. Le 18 mars 2015, la société HLM réalise une assignation en expulsion.
La procédure
Un appel est interjeté devant la Cour d’appel de Versailles, qui a rendu un arrêt en date du 19 février 2019.
Elle y affirme que le bail est régi par la législation sur les HLM. Selon la Cour, l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989 qui prévoit l’inapplicabilité des articles 10 et 15 de cette loi, relatives à la durée du contrat de bail et au droit de préemption, est donc applicable au contrat de bail.
La requérante se pourvoit en cassation. Elle soutient que le bail est soumis à la législation de droit commun lorsque l’immeuble, qui fait l’objet à l’origine d’un bail d’habitation de droit commun, est cédé à un organisme HLM. Selon la requérante, les articles 10 et 15 de la loi du 6 juillet 1989, dispositions de droit commun en matière de baux d’habitation, sont, par conséquent, applicables au bailleur.
La problématique
En cas de cession d’un immeuble régi par le droit commun des baux d’habitation à un organisme d’habitation à loyer modéré, le contrat de bail est-il régi par le régime de droit commun ou par les dispositions propres aux organismes HLM ?
Réponse de la Cour
En réponse au premier moyen tiré de l’inapplicabilité des dispositions de l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989, propres aux organismes HLM, la Cour rappelle qu’en effet, le droit commun des baux d’habitation, lors d’une telle acquisition par un organisme HLM, demeure applicable au bail en cours. En revanche, en cas de reconduction, un nouveau contrat intervient, et ce dernier est désormais régi par les dispositions relatives aux HLM.
En l’espèce, la Cour souligne que le bail était venu à expiration le 14 juillet 2002, et que, par conséquent, un nouveau bail est né à compter du 15 juillet 2002, lequel était soumis aux dispositions relatives aux HLM, dont l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989.
Ainsi, la Cour rejette le pourvoi.
Analyse de l’arrêt
Que dit l’article 40 I de la loi du 6 juillet 1989 ?
L’article 40 I de la loi du 6 juillet 1989 est une disposition propre aux habitations à loyer modéré, et par conséquent, dérogatoire au droit commun des baux d’habitation. Elle dispose que les articles 10 et 15 notamment, ne sont applicables aux logements dont les organismes HLM en sont propriétaires et qui ne font pas l’objet d’une convention régie par l’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation.
Les articles 10 et 15 de la loi du 6 juillet 1989 sont relatives aux congés délivrés par le bailleur ainsi qu’au droit de préemption dont dispose le locataire à cette occasion. En l’espèce, la requérante semblait souhaiter vouloir bénéficier de ce droit de préemption, régi par les dispositions de droit commun et inapplicable aux HLM.
L’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation est relative aux conventions conclues par les organismes HLM avec l’Etat. En l’espèce, la société HLM n’a pas conclu de telle convention, puisqu’elle a acquis l’immeuble au moyen d’un PLI.
Quand l’article 40 I de la loi du 6 juillet 1989 devient-elle applicable ?
La problématique de cet arrêt porte sur l’application ou non de cette loi, et plus largement du régime propre aux logements à loyer modéré aux contrats de bail.
Par principe, les contrats de bail régis par le droit commun demeurent soumis au droit des baux d’habitation en cas de cession de l’immeuble à un organisme HLM. Par conséquent, l’article 40 I de la loi du 6 juillet 1989 n’est pas applicable, et les dispositions relatives à la délivrance des congés et au droit de préemption s’appliquent au bailleur.
En revanche, selon les règles de droit commun des contrats, la reconduction fait naître un nouveau contrat de bail. Ce bail est, par conséquent, régi par les dispositions propres aux logements à loyer modéré, et les dispositions de l’article 40 I de la loi du 6 juillet 1989 s’applique : le locataire ne peut donc bénéficier des dispositions relatives à la délivrance des congés et au droit de préemption régies par les articles 10 et 15 de ladite loi.