Par un accord signé à Bruxelles le 19 février 2013, 25 États membres de l’Union européenne se sont entendus pour créer une juridiction européenne spécialisée en matière de brevets. En théorie, la Juridiction Unifiée des Brevets a compétence exclusive pour traiter des questions de contrefaçon et de la validité des brevets européens.
Elle doit donc remplacer les tribunaux nationaux pour les brevets européens. Mais la mise en place de cette juridiction nouvelle est chaotique. Après un premier écueil du côté de l’Allemagne, ce sont les Britanniques qui marquent un recul.
Juridiction Unifiée des Brevets : renforcer l’attractivité de l’Europe
L’entrée en vigueur de la Juridiction Unifiée des Brevets est très attendue. C’est également le cas pour le brevet unitaire couvrant tous les pays de l’Union européenne.
Ces outils sont indispensables au soutien de l’innovation en Europe. En sécurisant les titulaires de brevets, l’Europe renforce sa crédibilité, son attractivité et sa compétitivité. C’est un coup de pouce économique particulièrement appréciable dans cette période de crise. Notamment au regard de celle qui secoue l’Europe au rythme de la crise sanitaire actuelle. Pourtant, ce dispositif n’est toujours pas opérationnel.
Loi de ratification des états : le retard de l’Allemagne
Le 20 mars 2020, la Cour constitutionnelle allemande abroge la loi de ratification sur la juridiction unifiée. La cour estime que la ratification de l’accord n’a pas été votée selon les règles requises. Le fait de remplacer les tribunaux nationaux par une juridiction unifiée tend à fragiliser la souveraineté de l’état allemand.
En cela, la loi de ratification aurait dû être votée à la majorités 2/3 par les députés. Ces modalités n’ayant pas été respectées, le texte doit donc à nouveau être soumis au vote des députés pour recueillir la majorité requise.
Le gouvernement allemand s’est engagé à remettre au vote cette question dans les meilleurs délais. Dans cette attente, c’est tout le processus de mise en place de la Juridiction Unifiée des Brevets qui prend du retard.
Juridiction européenne : le recul britannique
Le 20 juillet 2020, le Royaume-Uni a quant à lui notifié au Conseil de l’Union européenne le retrait de sa ratification de l’accord. En effet celui-ci poursuit sa politique de Brexit. Par conséquent le gouvernement britannique ne souhaite pas que son pays prenne part au système de la juridiction unifiée et du brevet unique. De la même façon, il ne souhaite pas que cela soit soumis au contrôle de la CJUE.
En pratique, un tel retrait implique une modification profonde de l’accord initial. Concrètement, il en résulte que seuls les tribunaux britanniques seront compétents pour juger de la contrefaçon d’un brevet européen sur le territoire britannique. Il en va de même pour les décisions en matière de nullité de la partie britannique d’un brevet européen.
Par ailleurs, le brevet unique perd une grande partie de son intérêt si on considère que sa portée géographique est restreinte.
Pour les acteurs économiques européens, le brevet unique représentait l’avantage de couvrir l’ensemble du territoire, dont le Royaume-Uni. Une décision qui pourrait affecter l’attractivité de l’Europe pour les investisseurs.
Le choix de la section de la division centrale
L’entrée en vigueur de la Juridiction unifiée des Brevets est maintenant repoussée à une date indéterminée. Il faudra au préalable modifier les textes de l’accord avant d’en obtenir la ratification des États membres.
Par ailleurs, une nouvelle localisation doit être choisie pour la section de la division centrale, initialement prévue à Londres. Il s’agit d’un choix éminemment politique. La section de Londres devait traiter des dossiers concernant des inventions :
- dans les domaines des nécessités courantes de la vie,
- de la chimie,
- de la métallurgie.
On peut envisager une répartition de ces dossiers entre Paris et Munich. Le CNB a exprimé sa position, invitant le gouvernement français à reprendre une place prépondérante au sein du comité préparatoire de la nouvelle juridiction. Selon lui, la France représentant une grande part des contentieux des brevets en Europe, Paris a vocation à recevoir le futur siège de cette nouvelle juridiction européenne.