L’ordonnance n° 2020-116 en date du 12 février 2020 a introduit une nouvelle disposition dans le Code de la propriété intellectuelle : le droit d’opposition au brevet d’invention. Depuis le 1er avril dernier, les brevets d’invention délivrés par l’Institut national de la propriété industrielle peuvent en effet faire l’objet d’une opposition administrative. Cette procédure simple se présente comme une alternative à l’action judiciaire, unique voie de recours possible jusqu’alors pour obtenir la nullité d’un brevet. En cela, le droit français s’aligne sur les pratiques des offices de propriété industrielle au niveau européen et mondial. Il s’agit là d’une des nombreuses dispositions prises en application de la loi PACTE pour la modernisation et le renforcement de l’attractivité du système français de propriété industrielle. Observons les détails de cette procédure.
Faire opposition à un brevet d’invention
Le droit d’opposition est restreint au seul brevet d’invention français. Sont donc exclus les certificats d’utilité, les brevets européens, même pour leur partie française, et les certificats complémentaires de protection.
L’opposition doit être formée devant l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) dans un délai de neuf mois suivant la publication de la mention de délivrance du brevet au Bulletin officiel. La compétence en la matière revient au Directeur général de l’Institut.
Exercer le droit d’opposition
L’opposition peut être exercée par toute personne, hormis le titulaire du brevet, sans qu’il soit nécessaire de démontrer un intérêt à agir. En raison de la technicité de la procédure, l’INPI recommande toutefois d’avoir recours à un mandataire habilité.
Le droit d’opposition s’exerce exclusivement par voie électronique. Après avoir ouvert un compte sur le site inpi.fr, le demandeur doit joindre les éléments nécessaires dans l’espace e-procédures – le mémoire d’opposition et les pièces de preuves citées – au format pdf.
L’opposition peut porter sur tout ou partie du brevet. Elle doit être fondée sur l’un des motifs énumérés par l’article L. 613-23-1 du CPI :
– l’invention n’est pas brevetable ;
– la description du brevet n’est pas assez claire ou complète pour un professionnel du métier ;
– l’objet du brevet dépasse le contenu de la demande déposée.
Frais de procédure
L’exercice de l’opposition coûte la somme de 600 € réglée directement en ligne. Par ailleurs, l’ordonnance précise qu’en principe chacune des parties supporte elle-même les frais engagés pour la procédure. Le directeur général de l’INPI peut en décider autrement pour des raisons d’équité en fonction d’un barème qui devrait être établi prochainement. La formule est plus souple qu’en matière de contentieux judiciaire dans lequel le juge met à la charge du perdant les frais et dépens engagés par l’adversaire.
Procédure en 3 temps
En premier lieu, l’INPI étudie la recevabilité de la demande dans un délai qui peut aller jusqu’à 2 mois. Puis, s’ouvre la phase d’instruction contradictoire. Durant cette période allant de 8 à 11 mois, les observations transmises à l’INPI par une partie doivent obligatoirement être communiquées à l’autre afin qu’elle puisse y répondre. Le titulaire du brevet peut alors apporter une modification à la description de l’invention ou à ses dessins en réponse au motif soulevé. Enfin, vient la phase de décision dans laquelle le directeur de l’Institut statue sur l’opposition. Il peut alors faire droit à la demande et révoquer le brevet, maintenir le brevet dans une forme modifiée, ou bien rejeter la demande. Sans réponse dans un délai de 4 mois à compter de la fin de l’instruction, il faut considérer que l’opposition est refusée.
Effets et recours
Les effets de la décision rendue par l’INPI s’appliquent rétroactivement à la date du dépôt de la demande. La révocation du brevet a un effet absolu. Dans le cas d’une révocation partielle, le titulaire du brevet doit demander la modification de son titre devant l’Institut pour se conformer à la sentence.
La décision statuant sur la demande d’opposition à l’encontre d’un brevet peut néanmoins faire l’objet d’un recours suspensif devant la Cour d’appel de Paris. Celle-ci est également compétente pour les appels des actions civiles en matière de brevets, ainsi que pour les contestations relatives à leur délivrance. Les parties disposent d’un mois à compter de la notification de la décision pour former le recours. Le demandeur doit alors conclure dans les trois mois qui suivent. Le défendeur dispose ensuite d’un délai de trois mois dès la notification des conclusions du demandeur pour conclure à son tour.